à Séverine, Shima, Christelle, Stéphanie, Mélanie, Anne-Charlotte et toutes celles qui se reconnaîtront.
J’ai toujours compris la valeur de l’amitié. Dans mes jeunes années, ces liens étaient divers et variés, profonds ou superficiels, je l’admets volontiers, parfois même aussi carrément circonstanciels.
Cela a changé en donnant la vie. Plus de temps pour le jeu relationnel. En devenant mère, en abordant cette fameuse phase de matrescence que je ne soupçonnais même pas bien que j’aie tout tenté pour l’anticiper intellectuellement, j’ai ressenti la plus intense des solitudes et la plus originelle des injustices. Car bien que le conjoint soit présent, aimant, bienveillant et participant, je réalise alors que la responsabilité presque totale de la survie de mon enfant repose sur mes épaules. Car oui, sauf exceptions, c’est la mère qui nourrit, c’est elle qui se lève la nuit le plus souvent, c’est encore elle qui se lève le matin tous les jours peu importe l’état ; maladie, migraine, grosse soirée etc… c’est elle qui soigne, apaise, anticipe dans la permanence ingrate du quotidien même si le partenaire est généralement indéniablement heureusement présent pour l’occasionnel. Charge mentale, charge émotionnelle, charges tout court.
Il n’y aura plus vraiment de temps « off », plus vraiment de vacances, plus de véritables congés. Une claque assez peu instagramable.
Marguerite Duras disait : « La femme est un prolétariat ». Et oui…alors nous les femmes « modernes », libres, cultivées, dans les premières années de vie si intenses et si exigeantes de nos progénitures, il arrive que l’on s’en prenne plein la figure. On ravale notre fierté, oui comme les autres, on en bave, car c’est carrément rude, héroïque même de bosser, élever son enfant, garder une vie de couple et par dessus le marché, réussir à prendre soin de soi, on porte des lunettes de soleil pour cacher l’immense fatigue, on fait comme si, car nous, les mamans, quand on peut plus, pour nos enfant, on peut encore.
Alors, dans la rue, dans les couloirs du boulot, dans les magasins, dans les transports, on se reconnaît; les fameuses lunettes de soleil… un sourire complice, un regard, un geste d’aide. Entre les injonctions très théoriques de la parentalité bienveillante et les pétages de plombs bien pragmatiques, entre le regard jugeant de tante Janine et les réflexions archaïques et misogynes du collègue de café, sans parler de la copine Ginette qui t’explique comment faire et j’en passe, on sent…on sait…
Les amies qui sur ce chemin m’ont ouvert leur cœur pour partager les difficultés, les pleurs, les peurs, les angoisses mais aussi les joies et les immenses bonheurs, celles-ci sont comme des phares sur ma plage de la parentalité.Vous qui avez la générosité de la véritable écoute, qui me faites le cadeau de la franchise et de l’empathie qui soigne, vous êtes des repères et des soutiens précieux.
Je voudrais dire à toutes les autres mamans :
Quand dans la nuit, tu veilles, tu n’es pas seule, quand la journée tu en es à ta cinquième tasse à café, tu n’es pas seule, quand tu désespères de la dixième maladie infantile que tu soignes et que tu chopes à la suite, tu n’es pas seule, quand tu ne comprends pas que ton homme dorme comme avant alors que toi pas, tu n’es pas seule, quand tu t’en veux car épuisée, tu cries trop, tu n’es pas seule.
Nous ne sommes pas seules. Nous sommes sœurs.
Et dans une société pas encore advenue, puissiez-vous Messieurs, trouver l’équivalent dans le chemin tout aussi tortueux de la paternité.